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Arrêter le cannabis et retrouver sa liberté – le témoignage de Laure, 26 ans

Arrêter le cannabis

Laure* est une lycéenne comme les autres, bonne élève et sans histoire. Jusqu’au jour où une copine amène du cannabis à l’école. En deux ans, elle tombe dans la dépendance. Si elle a toujours réussi à garder les pieds sur terre, elle n’en comprendra les effets dévastateurs que bien plus tard. Aujourd’hui, elle a arrêté complètement le cannabis et retrouvé le goût de la liberté. Elle raconte.

 

J’ai commencé à consommer du cannabis à 16 ans. Je devais être en fin de 3e ou début de seconde. Mon copain de l’époque était étudiant et un jour il en a ramené. Au début, J’étais contre. Je trouvais cela grave de fumer de la drogue. Et puis, j’ai fini par me dire que je pouvais essayer, juste pour tester, voir la sensation que cela donnait. Je me suis mise à fumer avec lui mais de manière très occasionnelle. Quelques tafs quand on se voyait c’est-à-dire environ une fois par mois.

Au lycée c’était facile de se procurer du cannabis

La personne qui m’a vraiment amené vers le cannabis, c’est une copine de classe. On en avait parlé. Elle m’avait dit que son père fumait et qu’elle en ramènerait pour que l’on teste ensemble. Bien sûr, il n’en savait rien ! Elle-même ne fumait pas du tout à ce moment-là. Nous avons donc commencé toutes les deux. Ça s’est fait progressivement. Petit à petit, nous nous sommes mise à fumer tous les jours. Il y en avait toujours une qui avait un joint. On en achetait. Au lycée, c’était facile de s’en procurer. On connaissait ceux qui fumaient. Ce n’était pas notre bande de copains mais on s’entendait bien avec eux.

A partir de la première, je fumais régulièrement

Je dois avouer qu’on s’est bien amusé. C’est d’ailleurs sûrement pour cela qu’on a continué. Au début, on rigole bien. Mais ensuite le corps s’habitue. Ce n’est plus pareil. On fumait le matin avant d’aller en cours ou entre deux cours si on avait une heure de trou. A partir de la première, je fumais régulièrement mais pas encore toute seule. J’utilisais une partie de l’argent que ma grand-mère me donnait tous les mois pour payer mes barrettes. Je travaillais aussi les étés. Comme je ne suis pas dépensière, cet argent me permettait de tenir longtemps. Je suis aussi sortie avec des mecs qui fumaient et même qui dealaient ! Je dois avouer que ce n’était vraiment pas de bonnes fréquentations. Avec eux, souvent, je ne payais pas. En revanche, même si j’en ai eu l’occasion, je n’ai jamais essayé d’autres drogues. Ça me faisait trop peur.

J’ai raté mes épreuves du bac français à cause du cannabis

Je ne sais pas comment j’ai fait mais j’étais studieuse à l’école. Je révisais beaucoup chez moi. Si je n’avais pas pu prendre de notes, je demandais les cours. Je m’en suis toujours sortie. Quand on fumait le matin, les effets ne duraient pas toute la journée. Je ne chargeais pas trop les pétards. En revanche, j’ai foiré mes épreuves du bac français. Je n’ai eu la moyenne ni à l’oral ni à l’écrit. Je suis quasiment sûre que c’est à cause du cannabis. Je ne suivais pas assez les cours. J’ai quand même eu mon bac ES sans mention mais du premier coup.

Mes parents ne s’en sont jamais rendus compte.

Mes parents ne s’en sont jamais rendus compte. Une fois, en terminale, ma mère a trouvé une boîte dans ma chambre. Elle l’a ouvert et a découvert de l’herbe. Je me suis bien fait remonter les bretelles. Mais j’ai trouvé des excuses. Je lui ai dit que ce n’était pas à moi, que je le gardais pour une copine, que je ne fumais que de temps en temps. Jamais elle n’a imaginé que je fumais tous les jours. Elle ne le sait d’ailleurs toujours pas !

Fumer en écoutant du reggae. Je trouvais que c’était cool, peace and love

A partir de la terminale, je fumais seule. Je suis quelqu’un d’assez nerveux. Fumer un pétard me calmait. Au début, on fume parce que ça nous fait rire. On rit pour un oui ou pour un non. Ensuite, comme je le tolérais bien, le joint me calmait. Ça ne me défonçait plus comme au début. J’aimais bien cet esprit. Fumer en écoutant du reggae. C’était cool, peace and love. J’aimais bien l’état stone dans lequel cela me mettait.

J’avais peur de me faire retirer le permis à cause du cannabis

J’ai quand même essayé d’arrêter le cannabis à 18 ans. Je venais de passer mon permis et j’avais peur de me le faire retirer à cause du cannabis. J’habitais encore chez mes parents. Je me suis dit que si je me faisais arrêter et retirer mon permis à cause de cela, cela allait me poser de gros problème. J’ai arrêté 6 mois. Progressivement, j’ai réduit les doses. J’ai même roulé des pétards sans rien dedans ! Pendant ces 6 mois, je n’ai refumé qu’une fois avec un copain. En soirée, je compensais avec l’alcool. Je fumais aussi plus de cigarettes.

J’ai perdu mon père de façon brutale et j’ai repris

Et puis j’ai perdu mon père de façon assez brutal. Et là, j’ai lâché. J’ai repris jusqu’à la fin de mes études. Je fumais le soir et le week-end. En semaine, je me disais « une fois que tu as fini de réviser, tu fumes ton pétard. » Je fumais toute seule car dans mes fréquentations personne ne fumait à la fac et personne ne savait que je fumais. Ce n’est pas légal. Je n’avais pas envie de m’en vanter.

Lorsque je sortais, je pouvais fumer jusqu’à 10 pétards et je m’étais aussi mise à boire. J’étais vraiment devenue dépendante. Si je n’avais pas de quoi fumer, je n’étais pas bien, j’étais stressée. Il fallait absolument que je trouve de l’herbe sinon je ne pouvais pas passer une bonne soirée. Je ne pensais qu’à ça.

Lorsque j’ai commencé à travailler, j’ai vu les effets négatifs du cannabis

Lorsque j’ai démarré mon premier job, j’ai rapidement vu les effets négatifs du cannabis. Je n’arrivais pas à me concentrer sur ce que les gens me disaient. La mémoire à court terme me jouait des tours. Je leur faisais répéter ce qu’ils me disaient. Je me suis dit qu’il était temps d’arrêter le joint. J’étais sûre que c’était à cause de mes années de consommation. De plus à ce moment là, mon copain s’est fait retirer son permis à cause d’un contrôle au cannabis. Pourtant quand je l’ai connu, il avait arrêté le cannabis. Il s’était remis à fumer à cause de moi. Je culpabilisais un peu. Je me sentais responsable. Je me suis dit que si j’arrêtais, ça allait aussi l’aider à arrêter et à repasser son permis. J’ai pris ma décision en septembre 2018. Mais je n’ai vraiment arrêté que fin janvier 2019.

Depuis mars je suis maman. Je préférerais que ma fille n’y touche jamais.

Finalement, l’arrêt du cannabis n’a pas été si compliqué. J’avais peur car c’était devenu une habitude. On appréhende mais ça n’est pas si difficile. Pour être franche, en arrêtant, j’espérais que je pourrais en reprendre plus tard, de temps en temps. Je n’étais pas prête à arrêter totalement. Mais depuis mars je suis maman. Je n’ai pas envie de montrer cet exemple. J’ai su gérer ma consommation et cela n’a pas impacté mes études mais je sais les conséquences bien plus graves que cela peut avoir sur certaines personnes. On ne sait pas comment on va réagir. Je préférerais que ma fille n’y touche jamais.

Arrêter le cannabis : le plus agréable, c’est de ne plus se sentir dépendante de quelque chose.

Aujourd’hui, je vais mieux. J’ai arrêté le cannabis depuis un an. La mémoire est revenue petit à petit. Je me sens aussi moins fatiguée le matin. Je rêve à nouveau. Mais le plus agréable, c’est de ne plus se sentir dépendante de quelque chose. Maintenant je suis tranquille. Lorsque je conduis, je n’ai pas peur de faire un test. J’ai retrouvé une certaine liberté.

* Le prénom a été changé

Propos recueillis par Valérie François / CIDJ / Novembre 2020
Illustration : Unsplash

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